Pourquoi sommes-nous addicts à des pesticides ?

Source image : Doctissimo

Qui n’a jamais bu du café le matin pour se donner de l’énergie ? La molécule responsable de cet effet stimulant, la caféine, est produite par de nombreuses plantes, et fait partie de la famille des psychotropes. Les psychotropes sont des substances qui altèrent le fonctionnement du cerveau, et modifient par exemple la perception, l’humeur, le comportement ou la conscience.
La nicotine, la théobromine (constituant du cacao !) ou la cocaïne sont des psychotropes, produites également par des plantes. Mais comme vous pouvez vous en douter, les effets sont tout de même variables d’une substance à une autre. 

Mais pourquoi ces molécules ont-elles cet effet sur le cerveau ? Ce sont en fait des neuromimétiques, des molécules qui imitent la structure des neurotransmetteurs, messagers chimiques entre les neurones, d’où cet effet sur le cerveau.
Ces molécules stimulent le circuit de la récompense, un système neuronal qui favorise les actions nécessaires à la survie comme boire, manger ou se reproduire.
Ces actions vont libérer de la dopamine, molécule reliée au plaisir, et donc l’action sera connotée positivement. Reproduire cette action sera au fur et à mesure plus facile, car cela libérera davantage de dopamine à chaque fois, c’est l’effet renforçant. Mais il arrive que, surtout avec les drogues, ce système s’emballe et le désir devienne incontrôlable, c’est l’addiction.
On ne parle pas ici d’addiction à la caféine, en effet la caféine ne stimule pas l’effet renforçant, le désir reste contrôlé, et les effets restent moindres par rapport aux drogues.

Cependant, cette stimulation du circuit de la récompense est un paradoxe. En effet, les plantes qui produisent ces molécules ne le font pas pour rien, ce sont des pesticides naturels ! Ces molécules peuvent tuer les insectes ou les parasites qui les menacent. La caféine est en fait un pesticide efficace !
Alors pourquoi des molécules censées tuer des insectes sont non seulement tolérées par notre organisme, mais nous rendent également addicts ? C’est le paradoxe des drogues agréables. Par ailleurs, on sait que l’homme a acquis au cours de l’évolution des gènes pour détoxifier ces molécules, l’organisme se défend donc contre ces molécules, ce qui renforce le paradoxe. Il n’existe pas de consensus dans la communauté scientifique qui permettrait d’expliquer ce paradoxe. Néanmoins, plusieurs hypothèses ont été émises.

Une hypothèse assez attirante serait que, de la même manière que les fleurs produisent du pollen qui attire et récompense les pollinisateurs nécessaires à leur reproduction, les plantes produisant ces substances psychoactives les utiliseraient pour mieux se reproduire et se disperser dans la nature. Force est de constater qu’en effet, les cultures de café ou de tabac par exemple ont été démultipliées grâce à l’Homme !
Cependant, les plantes produisaient ces psychotropes bien avant l’existence des Homo Sapiens, et chez les animaux, à part certaines exceptions, ils ne sont pas intéressés par les effets récompensants des psychotropes, ces molécules ne semblent donc pas avoir évolué pour récompenser les animaux.
Une autre hypothèse avance qu’au départ ces molécules ont été utilisées comme défense contre les vers intestinaux par exemple, et que l’addiction serait une conséquence de cette utilisation massive par nos ancêtres. Mais cela n’explique pas pourquoi des animaux qui en consomment pour les mêmes raisons ne deviennent pas addicts comme les hommes.

Enfin une hypothèse pour le moins étonnante, mais que rien ne contredit : est-ce que ce paradoxe est le résultat d’un accident de l’évolution ? 
Au cours de l’évolution, différentes molécules sont apparues chez les plantes pour lutter contre les insectes et les parasites et donc les punir. Mais le hasard a fait que les plantes ont produit des molécules ayant l’effet inverse, activant le système de récompense chez d’autres animaux, et que ces molécules ont été maintenues au cours du temps.
Finalement, malgré quelques pistes, nous commençons que doucement à savoir pourquoi nous sommes addicts à ces pesticides.

Article écrit par Vitushanie Yogaranjan

Bibliographie :