Tout le monde le sait, après une journée de travail accablante, on n’a qu’une envie : rentrer chez soi et dormir. Chaque cellule de notre corps ainsi que l’organisme tout entier ont une horloge interne qui alterne entre activité et repos. Pendant que nous dormons, notre dépense énergétique baisse et la température corporelle diminue légèrement, le corps se repose.
Cependant, on peut se demander pourquoi le sommeil est aussi essentiel pour nous. En effet, après une demi-journée de randonnée, la pause de midi d’une heure et demi est bien suffisante pour ramener nos réserves énergétiques à leur maximum et nous repartons de bon train comme si nous avions dormi. Alors pourquoi dormir ? Ne suffirait-il pas de rester éveiller et de ne rien faire ?
On peut d’une part répondre oui et non d’autre part à cette question. Le corps est constitué d’organes et de parties spécialisées à différentes fonctions. Après un effort musculaire des jambes, il suffit de ne pas s’appuyer dessus pendant un moment pour qu’elles récupèrent. Il est cependant important de se rappeler qu’il y a des organes essentiels qui fonctionnent tout le temps sans exception : le plus important parmi ces derniers étant le cerveau.
Le sommeil est absolument nécessaire pour le cerveau. Quand on est éveillé, on enregistre en permanence des informations dont la plupart peuvent être rapidement recyclées. Un petit bruit que nous venons d’entendre est vite oublié si nous ne lui accordons pas d’attention particulière. D’autres informations doivent être traitées, mémorisées, triées et même apprises. Or ceci s’avère difficile si le cerveau reҫoit sans cesse de nouvelles informations. Le sommeil stabilise donc les membranes neuronales. Il est intéressant de noter que bien que l’organisme général se repose, le cerveau lui est pleinement actif et travaille.
Le sommeil d’une durée moyenne de 7 à 8 heures se divise chez l’homme en différentes phases : on a la phase d’endormissement, la phase de sommeil lent léger, la phase de sommeil lent profond, le sommeil paradoxal et la phase de latence. La phase d’endormissement s’explique par son nom : les yeux se brouillent, on baille et on finit par s’endormir. La phase de sommeil léger est une phase d’activité neuronale relativement faible dans laquelle le dormeur entend et perçoit toujours son environnement sans pour autant pouvoir agir. La phase de sommeil profond est très semblable à la phase légère mais le dormeur n’entend et ne perçoit plus son environnement. Quant à lui, le sommeil paradoxal est une phase d’activité cérébrale intense que l’on associe communément au rêve. Enfin la phase de latence est une phase dans laquelle deux choses peuvent se passer : soit on se réveille, soit le cycle du sommeil reprend du début.
Dans les phases de sommeil lent et paradoxal, la perception du monde extérieur est altérée. Le dormeur aura beaucoup de mal à réagir à d’éventuelles menaces ou dangers, sauf si elles se présentent sous forme de stimuli très forts. Prenons un exemple simple : nous dormons dans notre lit et un incendie se déclare. La grande majorité des personnes se réveillerait uniquement une fois que l’incendie ait atteint une proximité très forte avec le dormeur, ce qui le met en danger et peut facilement lui coûter la vie. Pour empêcher que ceci arrive, on a inventé les alarmes incendie : un bruit très fort correspondant à un fort stimuli pour nous ramener vers la conscience. On peut imaginer un scénario similaire mais au lieu d’un incendie un prédateur s’approche. Un homme se réveillera seulement une fois le prédateur sur lui, ce qui lui mènera probablement à sa mort.
Mais alors pourquoi le corps nous met-il autant en danger quand nous dormons ? La réponse est assez simple à trouver : il est adapté à nous. L’espèce humaine a évolué de telle sorte qu’il n’y a quasiment aucun danger pour elle. À l’abri des prédateurs et des variations du climat, l’homme n’a pas besoin de développer des mécanismes de défense lors de la phase vulnérable qu’est le sommeil.
Si on regarde d’autres espèces du règne animal, ceci est rarement le cas. Bien que les phases du sommeil soient dans la grande majorité les mêmes que chez l’homme, beaucoup d’animaux ont évolué avec des adaptations qui minimisent le danger auquel ils s’exposent lors du sommeil.
Un exemple assez exceptionnel est celui des cétacés. Les mammifères sont connus pour avoir un système respiratoire pulmonaire et ont donc besoin d’air pour pouvoir respirer et sont les proies de plus grands cétacés ou d’autres habitants marins. Ils doivent donc d’une part être capable de remonter à la surface de l’eau régulièrement pour respirer et d’autre part être capable de réagir rapidement pour fuir un éventuel danger ou se préparer à un combat. Des études ont montré que les cétacés dorment environ une dizaine de fois par jour pendant des durées de moins d’une heure. Le temps réduit du sommeil diminue déjà beaucoup le danger d’une éventuelle prédation. Pendant le sommeil, la majorité des cétacés effectue des battements lents et réguliers de leur queue à très faible profondeur, voire même à la surface afin de pouvoir remonter facilement et respirer. De rares espèces dorment en profondeur et remontent « inconsciemment » pour respirer puis se laissent resombrer en profondeur. Chez les cachalots, le sommeil s’effectue parfois à la verticale. Le problème de la respiration est donc réglé par une adaptation relativement simple : un mouvement quasi constant de la queue.
Cependant, l’adaptation de sommeil la plus remarquable est le fait que le sommeil est uni-hémisphérique. Chez les cétacés, seulement une moitié du cerveau « se repose » pendant que l’autre reste active. Les deux hémisphères du cerveau s’alternent pour rester actif ce qui permet d’une part de garder la queue en mouvement en permanence et d’autre part de garder l’œil du côté opposé de l’hémisphère actif ouvert, ce qui permet d’identifier un éventuel danger. Ainsi le sommeil est bien adapté au cétacé quand il dort : il peut respirer tout en se reposant et peut identifier facilement un danger.
Les oiseaux migrateurs partagent également l’adaptation du sommeil uni-hémisphérique et peuvent dormir en volant.
Les adaptations du sommeil peuvent aussi être beaucoup moins complexes. Les animaux capables de voler ou de grimper haut sur les arbres ont tendance à beaucoup dormir car ils sont relativement difficiles d’accès et généralement bien camouflés. Des grands prédateurs qui sont au sommet de la chaîne alimentaire dorment beaucoup car ils ne sont quasiment jamais en danger. On note que les animaux vivant en troupeau, meute ou famille dorment aussi beaucoup mais pas tous en même temps : certains animaux ont des rôles de sentinelles et protègent les autres.
Le fait de dormir debout peut aussi être considéré comme une adaptation au sommeil (bien que ce ne soit pas la seule explication à ce comportement). Les animaux dormants debout sont en général des herbivores et des animaux de fuite qui font office de proie à d’autres animaux. Le fait de dormir debout simplifie grandement la fuite en cas d’arrivée d’un prédateur. Le sommeil est donc bien adapté à la vie et aux dangers éventuels que peut rencontrer le dormeur.
Article rédigé par Alizée Wagner
Bibliographie :
- https://www.chuv.ch/fr/sommeil/cirs-home/patients-et-familles/a-quoi-sert-le-sommeil
- https://www.frcneurodon.org/comprendre-le-cerveau/a-la-decouverte-du-cerveau/le-sommeil/
- https://www.doctorales.fr/articles/actes-5/76-quand-le-sommeil-devient-le-lieu-d-expression-d-un-etat-vulnerable
- https://lejournal.cnrs.fr/nos-blogs/aux-frontieres-du-cerveau/ne-dormir-que-dun-oeil-le-sommeil-des-cetaces
- https://www.futura-sciences.com/planete/questions-reponses/animaux-animal-dort-plus-celui-dort-moins-7583/
- https://www.sleepcycle.com/sleep-science/the-weird-and-wonderful-sleeping-habits-of-animals/
- https://www.sleepfoundation.org/animals-and-sleep/connection-between-human-and-animal-sleep?utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A+nsfalert+%28Newsletter+-+NSF+Alert%29
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