Les adaptations des organismes marins au milieu pélagique

Carinaire de Lamarck en position de nage (gastéropode marin)

L’océan est un milieu très vaste et encore en grande partie peu connu. Il héberge différents écosystèmes tels que les récifs coralliens, les forêts algales, les abysses, etc. Cependant, ces types d’écosystèmes ne représentent qu’une infime partie de l’océan. La grande majorité de ce dernier est constitué tout simplement de la colonne d’eau : le milieu pélagique. Dans ce milieu, on trouve ce qu’on appelle le pélagos. Ce terme désigne l’ensemble des organismes vivants au sein de la colonne d’eau sans toucher le fond.

Comme on peut l’imaginer, dans ce milieu on trouve uniquement de l’eau et il n’y a donc pas de possibilité de se cacher ni de se poser pour pouvoir se reposer. Les êtres vivants de ce milieu ont donc développé des techniques pour s’adapter à ce milieu très contraignant. Nous allons nous intéresser aux adaptations de camouflage et de flottaison des organismes du milieu pélagique.

Tout d’abord, il est important de dire que le pélagos se divise en deux classes d’êtres vivants : le necton et le plancton. Tous deux vivent dans la colonne d’eau et la seule chose qui les différencie est leur aptitude à nager à contre-courant. En effet, le plancton ne possède pas les capacités de nager contre un courant et est donc entraîné par celui-ci. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, un organisme planctonique n’est pas forcément de petite taille. En effet, les méduses font partie du plancton et elles peuvent atteindre plusieurs mètres, voire une dizaine de mètres en taille. Il est important de faire cette distinction car, le plancton étant constitué d’organismes n’étant pas forcément de bons nageurs et étant toujours des proies d’autres espèces, il doit en plus développer des techniques de défense pour pouvoir survivre.

Commençons par nous intéresser au camouflage. Pour être invisible dans un milieu transparent capable de réfléchir la lumière, il y a deux solutions : soit on est soi-même transparent, soit on imite les reflets de la lumière naturelle. Si on regarde les poissons pélagiques comme le maquereau, le thon et même les grands cétacés, ils se sont en majorité approprié la technique d’imiter les reflets de l’eau. Leur face ventrale blanche simule le reflet blanc de la lumière sur la surface de l’eau, de sorte à ce que lorsque l’on plonge et qu’on regarde vers le haut, on a l’impression de voir le reflet de la surface. De même, leur surface dorsale est bleue ou du moins foncée, car quand on regarde vers les abysses, l’eau est d’un bleu vibrant. On trouve souvent sur les faces latérales des rayures ou autres lignes et ornementations pour imiter les rayons de lumière pouvant traverser la colonne d’eau. C’est donc un moyen de camouflage très efficace. La technique d’être transparent semble très logique : on est transparent donc on ne nous voit pas. En théorie, cela fonctionne bien. Sauf qu’il faut penser qu’il s’agit toujours d’organismes vivants qui ont des organes et qui vont se nourrir. Cette nourriture et ces organes ne sont pas transparents et si les organes sont mal distribués, cela rend l’organisme très visible, malgré sa transparence initiale. C’est pourquoi la majorité des organismes transparents ont condensé leurs organes digestifs au maximum pour qu’ils ne forment qu’un point qui peut facilement passer inaperçu. Ceci nous mène à une dernière technique de camouflage : être très petit. Plus on est petit, moins on ne nous voit. On remarque ici que les seuls organismes pélagiques de très grande taille sont des chasseurs qui eux-mêmes ont relativement peu de prédateurs dans le milieu marin.

Intéressons-nous à présent aux adaptations concernant la flottaison des organismes. Comme dit plus haut, les organismes pélagiques ne sont pas capables de se reposer et doivent donc trouver un moyen de se maintenir dans la colonne d’eau en permanence pour combattre la sédimentation. Cette sédimentation dépend de la densité d’un corps, de sa taille, de sa mobilité et des forces de frottement. Les adaptations logiques sont donc d’avoir une taille et une densité faible, être mobile et augmenter les forces de frottement. On note que tous les organismes pélagiques jouent sur au moins deux de ces caractères. Prenons l’exemple des organismes microscopiques comme les radiolaires. Ces organismes sont de taille micrométrique et de densité très faible. Ils possèdent de plus des ornementations en forme d’épines qui vont augmenter la force de frottement que subit l’organisme et ralentir leur sédimentation. On note que ces ornementations les rendent aussi plus difficiles à manger. Les organismes gélatineux comme les méduses ont opté pour une autre adaptation : ils sont constitués de 85 à 98% d’eau. Et si un organisme possède la même densité que l’eau car il est constitué presque uniquement d’eau, il ne va pas sédimenter. Si on regarde les grands cétacés, on constate qu’ils sont presque toujours en mouvement et que la plupart sont même équipés pour dormir en nageant. Ils jouent aussi sur leur densité en respirant de l’air. L’air étant nettement moins dense que l’eau, en en inspirant ils deviennent moins denses et peuvent se maintenir dans la colonne d’eau. Les poissons jouent aussi sur leur densité avec leur vessie natatoire.

Enfin, certains animaux ont développé des techniques de flottaison en s’aplatissant énormément ou en produisant un flotteur qui va les maintenir directement sous la surface. Un des exemples les plus connus de flotteurs sont les physalies. Souvent classées avec les méduses, ce sont en fait des siphonophores vivant en colonie de manière symbiotique. Cette symbiose est obligatoire car les siphonophores se sont spécialisés pour devenir des flotteurs ou des tentacules. On note que les physalies sont connues pour leur voile et pour leur réputation d’être très vénéneuses.

Une physalie prise devant un couché de soleil

Nous avons donc vu quelques-unes des adaptations majeures à la vie en milieu pélagique. Bien sûr, certains organismes se sont spécialisés davantage, mais à présent quand vous vous baignez dans l’océan, dites-vous que l’océan ouvert ne semble pas vide parce qu’il l’est mais tout simplement parce que vous n’êtes pas capables de voir ses habitants, et ce parce qu’ils font de leur mieux pour passer inaperçu.

WAGNER Alizée

Sources :

  • Habitats pélagiques. Milieu Marin France https://www.milieumarinfrance.fr/Nos-rubriques/Etat-du-milieu/Habitats-pelagiques (2019).
  • Lemée, R. Adaptations des organismes a la vie pelagique. https://docplayer.fr/60311357-Adaptations-des-organismes-a-la-vie-pelagique.html.
  • Laubier, L. & Pérès, J.-M. OCÉAN ET MERS (Vie marine) – Vie pélagique. Encyclopædia Universalis https://www.universalis.fr/encyclopedie/vie-pelagique/.

  • Sources photographiques : Changeux, T. & Sittler, A.-P. Carinaria lamarckii | DORIS. Doris https://doris.ffessm.fr/Especes/Carinaria-lamarckii-CarinaIre-de-Lamarck-2525 (2016). Barrett, L. Photographer of the Week – Matthew Smith. DivePhotoGuide https://www.divephotoguide.com/underwater-photography-special-features/article/underwater-photographer-week-matthew-smith (2016).