Vous avez très probablement déjà entendu des publicités pour le DULCOLAX® lors de votre vie, elles vous promettent un soulagement en une nuit voire en une heure selon le type de prise. Toutefois, saviez-vous que ce laxatif existe depuis des dizaines d’années ? Aux États-Unis, une étude publiée en 1959 dans « The American Journal of Digestive Diseases » démontre son efficacité sur certains patients souffrant de constipations régulières et lors d’une prise antérieure à des examens cœlioscopiques. Le DULCOLAX® est commercialisé en France depuis 1963, il est fort probable qu’il soit plus vieux que vous !

Le DULCOLAX® est un médicament non remboursé qui contient principalement du bisacodyl (4-4’-diacétoxydiphényl)(2-pyridyl)méthane.

Sous forme de comprimé, le bisacodyl augmente la production de sécrétions et la motricité de l’intestin. Il est utilisé comme traitement symptomatique, c’est-à-dire qu’il atténue ou supprime les symptômes d’une maladie sans s’attaquer à la cause de la constipation. Un comprimé contient 5 mg de bisacodyl, avec des traces d’huile de ricin, de lactose et de saccharose. Le comprimé est à avaler sans croquer avec un grand verre d’eau, les effets du laxatif ne sont pas immédiats. Si la prise est effectuée avant le coucher, les effets arrivent environ 10 heures plus tard, si elle est effectuée le matin, il ne faut compter qu’environ 5 heures avant l’apparition des effets. Les adultes peuvent prendre 1 à 2 comprimés par jour, pour les enfants de plus de 6 ans la dose est limitée à 1 comprimé par jour et la durée du traitement est choisie par le médecin, car elle doit rester exceptionnelle.

Sous forme de suppositoire, le DULCOLAX® contient 10 mg de bisacodyl par suppositoire. Le passage par la voie rectale entraîne une contraction du rectum, le laxatif a un effet local. Il se fait ressentir dans un délai de 30 minutes à 1 heure après la prise. Il déclenche lui aussi une augmentation de la motricité colique et la sécrétion intestinale d’eau, d’électrolytes et de protéines au niveau du rectum. Il n’est disponible qu’à l’adulte, avec une limite de 1 suppositoire par jour, cependant en cas d’hémorroïdes, de fissure anale ou de rectocolite hémorragique, il faut prendre ses précautions. Demandez à votre médecin s’il est sûr pour vous d’avoir recours à ce médicament dans ces cas.

Le DULCOLAX® n’est pas à administrer aux enfants de moins de 6 ans, peu importe sa forme.

Le bisacodyl est un laxatif stimulant, il inhibe l’absorption d’eau dans les intestins et agit sur les cellules musculaires lisses du côlon. Pour être plus précis, la prise de bisacodyl va déclencher l’augmentation du gène COX2 dans les macrophages, on le sait par étude des ARNm de macrophages. Plus le gène COX2 est exprimé, plus il y a une sécrétion de prostaglandine E₂ (PGE₂) dans les cellules épithéliale intestinales, ainsi qu’une inhibition de l’activité de la pompe Na+/K+-ATPase, augmentant la pression osmotique, qui accentue la sécrétion d’électrolytes comme Na+ et K+. La forte présence de PGE₂ va aussi diminuer l’expression de l’aquaporine-3 dans les cellules de la muqueuse du côlon, il est un facteur paracrine de cette aquaporine. À environ 5 heures après la prise d’un comprimé, il y a une baisse de presque 80 % de l’expression de l’aquaporine-3 dans l’ensemble de l’intestin. Les aquaporines sont spécialisées dans le transfert de molécules d’eau, leur inhibition permet de garder un maximum d’eau dans les selles pour les ramollir et faciliter le passage des excréments.

Bien que le DULCOLAX® soit un médicament qui peut être acheté en pharmacie sans ordonnance, il reste toujours des risques à son utilisation et ils sont même nombreux.

La prise de ce laxatif est fortement contre-indiquée si vous êtes atteint de / d’ : une appendicite aiguë, colopathie organique inflammatoire, déplétion hydrosodée (perte de sel), déshydratation sévère, douleurs abdominales non diagnostiquées, hypersensibilité à l’un des composants, maladie de Crohn, occlusion intestinale (rétrécissement intestinal, fécalome, etc..), rectocolite hémorragique ou syndrome subocclusif. Il s’agit de cas extrêmes, mais il existe toujours un risque modéré pour les enfants de 6 à 15 ans, les personnes âgées, si vous faites de l’insuffisance rénale ou êtes à risque de trouble hydroélectrolytique, et les femmes lors de la grossesse et l’allaitement. Les effets du bisacodyl lors de la grossesse sont mal connus, il faut prendre ses précautions.

Le DULCOLAX® est également susceptible d’interagir avec d’autres médicaments, qui peuvent provoquer des « torsades de pointes », un trouble du rythme cardiaque grave. Si vous prenez des corticoïdes, des diurétiques ou encore des médicaments avec de la digoxine, digitoxine ou amphotéricine, prévenez votre pharmacien ou médecin avant la prise du laxatif.

En conditions normales, son usage doit rester épisodique ou en tant que cure brève de maximum 8 à 10 jours. Un usage régulier entraînera une dépendance, des troubles intestinaux graves ou des troubles du rythme cardiaque dues à la perte de sels minéraux (surtout le potassium) lors de l’absorption des nutriments.

Les possibles effets indésirables sont la diarrhée, les douleurs abdominales et les nausées dans 1 à 10 % des cas ; des vomissements, des sensations de brûlure et de douleur anale, un saignement rectal et des spasmes abdominaux pouvant provoquer un malaise dans moins de 1 % des cas ; une inflammation du côlon, des démangeaisons, une réaction allergique, de la déshydratation dans moins de 0,1 % des cas ; voire une hypokaliémie, baisse du taux de potassium dans le sang, pour quelques cas.

Vous l’aurez compris, malgré qu’il soit présent dans chaque pharmacie et qu’il soit promu dans des publicités, la prise de DULCOLAX® reste dangereuse dans des conditions exceptionnelles. Le traitement doit être immédiatement arrêté s’il provoque la diarrhée ou des douleurs abdominales, alors demandez toujours conseil à votre pharmacien.ne ou à votre médecin si vous souhaitez en faire usage.

Ce médicament peut aider en cas de nécessité, cependant le traitement de la constipation se repose sur des mesures hygiénodiététiques. Afin de réduire le risque de constipation, il est conseillé d’avoir une alimentation riche en fibre insoluble (céréales, graines, légumes, fruits notamment le pruneau) pour améliorer votre transit, qui peut en même temps accompagner une transition vers une consommation plus écologique. L’hydratation reste un composant majeur, alors forcez vous à boire un peu plus d’eau, n’attendez pas d’avoir soif pour vous hydrater et privilégier les boissons riches en magnésium. Enfin, l’activité physique régulière et une amélioration de la position sur les toilettes ne pourront que vous aider !

Rédigé par Alison MAILLET

Sources

• « DULCOLAX », VIDAL, 2 janvier 2024, https://www.vidal.fr/medicaments/gammes/dulcolax-3083.html
• « Bisacodyl : substance active à effet thérapeutique », VIDAL, https://www.vidal.fr/medicaments/substances/bisacodyl-591.html
• David A. Dreiling et al., « The Therapeutic Usefulness of Dulcolax® (Bisacodyl), a New Nonpurgative Laxative », The American Journal of Digestive Diseases 4, n^o 4 (1959): 311‑20, https://doi.org/10.1007/BF02231199
• « Constipation et traitements laxatifs : l’EBM face aux idées reçues », FMC-HGE, s. d., https://www.fmcgastro.org/texte-postu/postu-2022/constipation-et-traitements-laxatifs-lebm-face-aux-idees-recues/
• D. R. Saunders et al., « Effect of Bisacodyl on the Structure and Function of Rodent and Human Intestine », Gastroenterology 72, n^o 5 Pt 1 (1977): 849‑56
• Nobutomo Ikarashi et al., « The Laxative Effect of Bisacodyl Is Attributable to Decreased Aquaporin-3 Expression in the Colon Induced by Increased PGE2 Secretion from Macrophages », American Journal of Physiology. Gastrointestinal and Liver Physiology 301, n^o 5 (2011): G887-895, https://doi.org/10.1152/ajpgi.00286.2011
• « Que manger quand on est constipé ? », Livi, 13 septembre 2021, https://www.livi.fr/en-bonne-sante/constipation-que-manger/